Parfois, l’on se prend à aimer une forme, comme on aime, par exemple, un morceau de musique composé en anglais dont on ne comprend pas un mot, mais dont la mélodie reste dans la tête. Cette forme nous émeut, nous touche et nous ravit. Puis l’on fait des progrès dans les langues à la faveur d’une année Erasmus et soudain, le sens abominé de ces si douces compositions nous rejaillit au visage, comme une douche de sperme non sollicitée.
Ainsi Bastien Vivès, chantre des jeunes filles en fleur, nous livre à travers son œuvre et comme chaque auteur certes un portrait de lui même que beaucoup de lecteurs (trices) ne font qu'effleurer, ravis, béats, hypnotisés par les tours de cet habile illusionniste.
Mais derrière la cape, au fond de la manche, dans le chapeau qu'y a-t-il ?
Un bouquet, une carte, un lapin albinos ?
Bastien Vivès nous livre, sans le savoir, un secret.
Un aveu.
Un mode opératoire.
Une signature.
Derrière la cape, au fond de la manche, dans le chapeau, on trouve une scie, des menottes, un couteau.
Le garçon, sans doute, l’ignore. Les grands sociopathes ne se révèlent qu’aux alentours de la trentaine, c’est une statistique que la Criminelle ne contestera pas. L’âge de Jésus lors du saint sacrifice, aussi. Mais dans un autre registre.
Couchant des formes délicates aux personnalités inexistantes, des poupées gonflables décérébrées, de belles idiotes altières pétries des intransigeances que confère la beauté, il serait facile de jeter sur Vivès son manque d'expérience, de maturité, de vécu, afin de donner une quelquonque raison, une excuse à ses personnages en plastique aux profondeurs d'âme d'une Barbie ou d'un Ken.
Non, ça n'est pas cela.
Incapable de ressentir les émotions humaines, Bastien Vivès, inapte à éprouver une quelconque empathie, se contente de les singer.
On s'imagine à tort (et c'est là le grand art de l'auteur), que Vivès prend du plaisir à dessiner ses personnages. Car plaisir il y a, indéniable, dans ce dessin froid et virtuose, gracieux et glacial, et deux œuvres récentes du prodige en culottes marquent un changement (une rupture psychotique ?), un mouvement de l'individu vers ses réelles et profondes aspirations : la torture.
Regardons la couverture de cet ouvrage pervers qu’est Polina.
Une petite fille se fait modeler par un démiurge aveugle et muet, maintenue dans une position bondage (mais sans les accessoires) pour le plaisir du sado-masochiste sommeillant en chacun de ceux qui, en contemplant cette image, ont secrètement joui.
Pauvre Polina qui écarte les jambes, tourmentée par l'auteur, qui lui inflige page après page l'atroce calvaire d'une discipline proche du supplice, la danse classique, laissant à croire aux badauds ébahis qu'il n'est alors question que de dépassement de soi.
Un gros petit garçon s'amusant à arracher les ailes d'une mouche n'en ferait pas autant.
Et alors, qu'est-ce que ce livre, Polina ? Pour jouir de leurs crimes, certains psychopathes filment leurs actes odieux, envoient des lettres aux familles, haranguent les médias.
Polina n'est que le témoignage narcissique d'un Ted Bundy qui se cherche.
Les Melons de la Colère sonne comme l'aveu d'un Marc Dutroux qui se trouve. Qui s'assume.
Violant son pauvre personnage de jeune campagnarde un peu concon, lui faisant subir mille pénétrations humiliantes, Vivès est à son aise. En pleine décompensation psychotique, son art s'exprime alors pleinement.
Son Art.
Son Oeuvre.
Pas le dessin. Ni la BD.
Mais bien le crime. Le meurtre. Le sang. Le viol et la torture.
Mais alors, que faire de ces productions intermédiaires (Dans mes yeux, Le goût du chlore, Elles), ses odes à la gloire de la beauté, de la jeunesse et de la femme désirée ?
Qu'on ne s'y laisse pas prendre: comme le bête fil rouge attirant la grenouille sans cervelle et toute en jambes : CE SONT DES LEURRES !
Ainsi l'odieux Vivès, non content de passages à l'acte sur des âmes virtuelles et imaginaires, attire par ses illusions de petit magicien de candides lectrices dans ses filets pervers.
Les voilà, ses véritables proies !
Mesdemoiselles, un psychopathe est parmi nous, Mea culpa en a dressé le profil.
L'analyse bio mécanique des gestes et des postures de ce louche individu ne trompe pas :
Ce grand corps mou, voûté par quelque oppression intérieure, et dont son habitant ne semble jamais savoir que faire — comment placer ce bras qui m’indispose ? Que faire de cette main qui ne veut point m’obéir ? Et ce cou, vaut-il mieux le tendre ou le rentrer ? —, ce sac de peau mal coupé qui baille aux emmanchures, n’est-ce pas le signe tangible d’une incompatibilité du fond avec la forme ? Bastien Vivès ne remplit pas son corps, comme il ne remplit pas ses livres. Pas encore, car nous laissons à la jeunesse le temps de s’achever. De, comme dirait Grisom dans les Experts, « monter en puissance ».
L'analyse comportementale de ce froid serpent puceau psychopathe qui twittait le 30 avril dernier « Mais y pas un moment où il devrait y avoir la guerre ? Enfin la vraie ! Celle qui fait qu'après, on baise à fond ! » (ses pulsions sexuelles ne s'assouvissent-elles donc que par le spectacle de la barbarie ?) ou qui avoue sans honte sa monomanie de collectionneur obsessionnel de figurines de dessins animés japonais des années 80 finit de nous éclairer sur l'individu.
Mea Culpa tient à mettre en garde lecteurs, lectrices, collègues, collaborateurs, journalistes et coloristes : Bastien Vivès est là, en liberté, parmi nous. A défaut de savoir faire une série de tueur, il nous semble plus que probable qu'il soit... un tueur en série.
Sœur Sourire
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